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Assurance qualité externe de la recherche dans les établissements d’enseignement supérieur : bilan des pratiques des agences européennes d'assurance qualité

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À l’occasion de la publication du rapport final du groupe de travail sur l'assurance qualité externe de la recherche, cet article revient sur ses objectifs, les principaux résultats de l’étude et positionne le Hcéres parmi ses homologues européens.

Depuis septembre 2023, le Hcéres co-préside un groupe de travail sur l’assurance qualité externe de la recherche avec son agence partenaire suédoise (UKÄ), dans le cadre des activités de l’Association européenne pour l'assurance qualité dans l'enseignement supérieur (ENQA). À l’occasion de la publication du rapport final du groupe de travail, cet article revient sur ses objectifs, les principaux résultats de l’étude et positionne le Hcéres parmi ses homologues européens. 

La qualité de la recherche, un enjeu du processus de Bologne souvent oublié

Au cours des 25 dernières années, les discussions sur l'assurance qualité externe au niveau européen se sont principalement concentrées sur la formation, en dépit des mises en garde des ministres de l'Espace européen de l'enseignement supérieur (EEES), dans le cadre du processus de Bologne, selon lesquels « les efforts pour introduire les changements structurels et améliorer la qualité de l’enseignement ne devraient pas porter atteinte à l’effort visant à renforcer la recherche et l’innovation. Par conséquent, nous mettons l’accent sur l’importance de la recherche et de la formation à la recherche pour maintenir et améliorer la qualité de l’EEES ainsi que pour renforcer la compétitivité et l’attractivité de celui-ci » (communiqué de Bergen, 2005).

L’assurance qualité externe de la recherche est une pratique plurielle mais répandue dans l’Espace européen d’enseignement supérieur

C'est dans ce contexte qu’un groupe de travail de l'ENQA composé de 16 agences et co-présidé par le Hcéres et UKÄ, a étudié le sujet de l'assurance qualité externe (AQE) de la recherche dans les établissements d'enseignement supérieur, aux niveaux institutionnels, des formations et des unités de recherche. Le rapport publié en mars 2025 montre qu’il y a peu de littérature sur le sujet et que l’AQE de la recherche est souvent confondue avec l'évaluation de la recherche (au sens de research assessment) visant à évaluer les produits de la recherche. Cette étude a défini le concept d'AQE de la recherche comme "un terme global faisant référence à un processus régulier d’évaluation (suivi, garantie, maintien et amélioration) de la qualité de l'environnement de la recherche dans les établissements d’enseignement supérieur, y compris son interrelation avec les missions de formation et d'impact sociétal des établissements d’enseignement supérieur".

 

Agences membres du groupe de travail de l’ENQA sur l’AQE de la recherche

A3ES (Portugal), ACSUCYL (Castilla y Leon - Espagne), ANVUR (Italie), AQ Autriche, ANQA (Arménie), ASHE (Croatie), CTI (France), EQ-Arts, evalag (Allemagne), HAKA (Estonie), Hcéres (France), IAQA (Islande), MAB (Hongrie), NCEQE (Géorgie), THEQC (Turquie), UKÄ (Suède).

 

Le rapport présente les principales tendances liées à l'AQE de la recherche qui ont été identifiées grâce à une enquête par questionnaire et entretiens et fournit aux agences des pistes de réflexion pour développer ou mettre en œuvre l'AQE de la recherche. Sur les 59 agences ayant répondu au questionnaire, 42 ont déclaré être déjà impliquées dans l'AQE de la recherche, la plupart l’effectuent au niveau institutionnel et de formation et, dans une moindre mesure, au niveau des unités de recherche. Cependant, étant donné que les Références et lignes directrices pour l’assurance qualité dans l’Espace européen d’enseignement supérieur (ESG) ne prennent que très peu en compte la dimension recherche, les pratiques des agences sont plus diversifiées et hétérogènes que pour l’assurance qualité de la formation. Les référentiels d’évaluation des agences couvrent généralement les aspects suivants, regroupés en trois thèmes principaux :

  • Aspects généraux de la gestion et de la politique de la recherche : organisation et gestion de la recherche ; politique et stratégie de recherche ; politique d'assurance qualité pour la recherche ;
  • Environnement de recherche : infrastructure de recherche, bibliothèques et archives ; collaboration et apprentissage mutuel avec d'autres organismes engagés dans la recherche ;
  • Liens entre la recherche et la formation : impact de la recherche sur la formation ; implication des chercheurs dans les activités d'enseignement.

Les témoignages des agences montrent que l'étroite collaboration avec leurs parties prenantes et les approches intégrées de l'AQE, consistant à incorporer l'AQE de la recherche dans l’évaluation des établissements d'enseignement supérieur ou des formations, sont considérées comme des facteurs de réussite. L'étude a identifié des défis à relever pour une mise en œuvre réussie de l'AQE de la recherche, notamment l'absence de lignes directrices européennes ou internationales et l’existence d’un système national dispersé avec de multiples acteurs impliqués dans l'AQE de la recherche.

Quant aux 17 des 59 agences ne s'engageant pas dans l'AQE de la recherche, l’étude montre que celles qui sont prêtes à le faire sont confrontées à deux obstacles majeurs : l'absence d'un cadre législatif national favorable et la réticence des établissements d'enseignement supérieur.

Le Hcéres espère que les résultats de ce rapport permettront d’éclairer la révision des ESG à venir, dont la version finale doit être votée par les ministres de l’EEES en 2027, et de contribuer à renforcer les synergies entre l’EEES et l’Espace européen de la recherche, comme précisé dans le communiqué de Tirana, dernière étape clef du processus de Bologne à ce jour. De plus, ce rapport intervient à un moment charnière de la construction européenne marquée par des discussions sur l’évaluation des alliances d’universités européennes et des diplômes européens, qui devrait prendre en compte la dimension recherche inhérente à ces objets, selon le Hcéres. 

Le Hcéres, une agence déjà bien engagée dans l’assurance qualité externe de la recherche

Le cadre législatif dans lequel opère le Hcéres et décrit ses missions (article L114-3-1 du Code de la recherche) lui permet de pleinement s’engager dans l’assurance qualité externe de la recherche dans les établissements d’enseignement supérieur, telle que définie dans le rapport du groupe de travail de l’ENQA.

En effet, tous les référentiels d’évaluation du Hcéres comprennent une dimension recherche, évaluent l’adossement de la formation à la recherche, la mise en place d’une politique de recherche et innovation et l’inscription de la science dans la société, en s’assurant de la mise en place de démarches respectueuses de l’intégrité scientifique et de la science ouverte. Si beaucoup d’agences européennes évaluent le lien formation-recherche et la politique de recherche des établissements, l’évaluation des unités de recherche en tant que telles est une des spécificités du Hcéres, pratiquée par peu d’agences européennes.

Au-delà du périmètre défini dans le rapport comme relevant de l’assurance qualité externe de la recherche, le Hcéres réalise des évaluations d’organismes de recherche, des études bibliométriques au travers de son Observatoire des Sciences et Technique (OST) et promeut l’intégrité scientifique avec l’Office français d’intégrité scientifique (OFIS). D’autres agences d’assurance qualité européennes ont également des mandats plus étendus en matière de recherche, comprenant l’évaluation des produits de la recherche (ANVUR – Italie), l’évaluation des projets de recherche et demandes de financements (AQUIB – Baléares, Espagne), l’évaluation des enseignants-chercheurs dans le cadre de leurs avancées de carrière (ANECA – Espagne) et l’évaluation des institutions de recherche (ASHE – Croatie).