Université de Rouen Normandie

Observations du Président du Hcéres

L’évaluation de l’Université de Rouen Normandie (URN) a été conduite par un comité d’experts présidé par Mme Catherine FLORENTZ, Professeur à l’université de Strasbourg dans une période marquée par la crise sanitaire et dans un contexte d’interrogations profondes sur la structuration du site normand. Cette situation impose aux universités de la région de définir les caractéristiques de leur identité distinctive et la nature de leurs complémentarités et de choisir ce qu’elles veulent faire ensemble.

C’est pourquoi le comité d’experts salue la capacité de l’Université Rouen Normandie à avoir choisi depuis plus de 10 ans un axe stratégique lui offrant un positionnement différencié :  la responsabilité sociétale et le développement durable (RSDD). Il s’agit d’une démarche volontariste visant à créer une signature de l’établissement qui caractérise sa contribution à l’effort collectif de la société pour affronter toutes les transitions. L’objectif affiché est de faire de cet axe stratégique un vecteur de transformation et un principe ordonnant l’ensemble de la vie de l’établissement, sa gouvernance comme sa politique de formation, de recherche et d’innovation. 

L’Université de Rouen Normandie a ainsi été l’une des premières universités lauréates du label DD&RS « Développement durable et responsabilité sociétale » de l’enseignement supérieur. Elle a été, après l’accident industriel de Lubrizol, à l’initiative de la création d’un observatoire multirisques normand associant l’État, la Région et les grandes agglomérations, et elle anime des groupes interdisciplinaires sur les transitions. Son ambition intègre naturellement le développement de formations consacrées aux nouveaux métiers du développement durable.

Si le comité d’experts encourage la construction de cette identité porteuse d’attractivité, il considère cependant que, malgré les actions engagées, malgré la persévérance politique de l’établissement, la stratégie de l’Université de Rouen Normandie est toujours insuffisamment définie et partagée en son sein, avec un écart trop important entre la gouvernance et le terrain. Sa mise en œuvre, tout particulièrement en recherche et en formation, peine à donner à ces activités la visibilité attendue. De ce fait, l’université qui fut pionnière risque aujourd’hui de perdre son avance. Pour éviter cet écueil, le comité d’experts recommande que soit établi, en coconstruction avec les acteurs concernés, un plan stratégique de déclinaison de la signature choisie dans tous les domaines, mais d’abord dans le cadre des politiques de recherche, d’innovation, et de formation à tous les niveaux. Il incite l’université à définir un ou des secteurs dans lesquels elle pourrait déployer sa politique en matière de RSDD, en particulier dans le champ de la recherche, afin de se différencier plus nettement et d’accroître son attractivité. Il s’agit là du problème majeur mis en lumière par l’évaluation.

La mise en œuvre d’un tel plan pourrait avantageusement prendre appui sur deux orientations également retenues par l’établissement. D’une part, l’université vise un ancrage territorial et une visibilité accrus par la réalisation de campus thématiquement spécialisés et cette politique a permis aussi bien le renforcement des liens avec les collectivités que le développement d’une vie étudiante active. Elle est particulièrement réussie avec le campus santé, ce qui pourrait, selon le comité, conduire à un rapprochement accru entre l’Université et l’Hôpital. D’autre part, l’URN affiche une forte volonté de développer une offre de formation tout au long de la vie adaptée aux attentes du milieu industriel environnant, comme à sa stratégie RSDD. Le comité estime que les résultats en formation continue comme, en matière de formations en alternance, sont trop timides et recommande une politique plus proactive et plus ambitieuse, fondée sur une analyse des besoins réels et sur un modèle économique adapté.

En matière de gouvernance et de pilotage, le rapport d’évaluation souligne la solidité de l’équipe de gouvernance, l’engagement des équipes de soutien et l’important effort d’adaptation de l’organisation à la stratégie et de maîtrise de la dépense pour dégager des marges d’action. Il note cependant une structuration trop complexe qui rend obscure la compréhension des circuits de décision et accroît le risque d’un découplage entre la gouvernance et le terrain. Il recommande l’élaboration d’une feuille de route du déploiement de la stratégie pour en favoriser l’appropriation par les acteurs internes et externes. Pour pallier les insuffisances constatées, elle gagnera à s’accompagner d’un renforcement des outils d’aide à la décision, d’une amélioration du système d’information et de la mise en place d’indicateurs robustes de suivi des actions et d’évaluation de leur impact.

La Région Normandie apporte aux universités un soutien sans faille. Cette situation favorable impose aux établissements de choisir enfin un mode d’organisation et de coordination qui puisse répondre aux attentes de leur environnement régional et aux besoins du dialogue avec les collectivités. Toute perspective de fusion ayant été écartée, l’organisation universitaire régionale doit se définir en fonction des actions à mener ensemble, notamment en matière de communication, de valorisation, d’attractivité collective. C’est à cette fin qu’une COMUE expérimentale a été envisagée, mais dont le comité a constaté que la création tardait.

C’est pourquoi le Hcéres recommande à l’État dans le cadre de la démarche contractuelle d’accompagner les efforts des établissements de la région normande visant à renforcer leur identité distinctive et, s’agissant de l’Université de Rouen Normandie, à soutenir le déploiement de sa stratégie RSDD, tout en fixant aux trois établissements universitaires un délai pour la mise en place d’une structuration régionale qui pourrait faire l’objet d’un dialogue original entre le monde universitaire normand, l’État et la Région.